Thomas SAHN

Contacts

Email : tsahn@eila.univ-paris-diderot.fr

Adresse professionnelle
Université Paris Diderot – Paris 7
UFR d’Études Interculturelles de Langues Appliquées (EILA)
Département Langues Étrangères Appliquées (LEA)
8 place Paul Ricœur,
F-75205 Paris cedex 13

Thèmes de recherche

« L’homme est un animal symbolique ». Cette déclaration chère à Umberto Eco, sur laquelle il revient de façon régulière (cf. p. ex. : Eco 1988/1980, Eco 2013/1984), ne représente pas seulement, pour lui, un simple détournement ludique de la fameuse formule aristotélicienne. Eco voit au contraire dans la capacité de l’être humain à « se détacher de la perception et de l’expérience brutes, et s’abstraire du hic et nunc » (Eco 1988/1980 : 185) le fondement nécessaire de toute société humaine. La faculté de se libérer d’une expérience du monde gouvernée par des réactions instinctives aux stimuli perçus semble effectivement constituer la première condition nécessaire afin de pouvoir passer, comme le formule le sémioticien italien, de « l’univers du signal » à « l’univers du sens ». Dès lors, les stimuli perçus ne constituent plus seulement des « unités d’information physique transmise » mais deviennent « forme signifiante » que nous devons « emplir de signifiés » (Eco 1972/1968 : 55sq). Mais l’« activité symbolique » de l’être humain, pour reprendre une formulation d’Umberto Eco, consiste non seulement à charger de sens les stimuli dont il fait l’expérience mais aussi et surtout à élaborer et à articuler à son tour des signes afin de communiquer avec ses semblables et donner ainsi un sens au monde qui l’entoure (cf. Eco 1988/1980 : 185sq.). Or, à partir du moment où nous associons de façon plus ou moins collective des traits sémantiques à des traits sensibles nous nous retrouvons nécessairement face à un code, notion clé de la description de tout processus sémiotique par laquelle nous pouvons entendre, de façon générale, un « ensemble de règles permettant de produire ou de déchiffrer des signes ou des ensembles de signes » (Klinkenberg 1996 : 28).

Dans notre projet de thèse encadré par Prof. Dr. Sabine Bastian (Universität Leipzig) et Prof. Dr. Jean-Pierre Goudaillier (Université Paris Descartes), nous proposons une introduction à une analyse sémiologique des personnages “humains” ou “(dés-)humanisés” des récits graphiques pluricodes que nous appelons communément des bandes dessinées. Sachant que, d’un point de vue sémiologique, des concepts tels que l’“âge” ou le “sexe”, le “pauvre” ou le “riche”, le “bon” ou le “mauvais” ne sont en effet rien d’autre que des valeurs sémantiques que nous attribuons, selon les codes stabilisés dans une communauté sémiotique donnée, à des traits distinctifs perceptibles, la bande dessinée constitue un parfait exemple des processus sémiotiques découpant, de façon plus ou moins différente et à l’aide d’un choix de traits distinctifs (système signifiant), le continuum du concept “être humain” (système signifié). En effet, contrairement aux récits littéraires, la bande dessinée assure généralement l’identification des différents personnages “humains” ou “(dés)humanisés” non seulement à l’aide des oppositions linguistiques mais aussi, et notamment, au travers de celles qui sont de nature iconique et plastique. Or, si les codes régissant la construction graphique de ces différents personnages et leur rôle dans le récit ne connaissent pas de codification par une autorité normative, telle par exemple un dictionnaire, nous montrerons à l’aide d’un corpus, qui englobe à la fois des œuvres francophones d’après-guerre à aujourd’hui et des œuvres réalisées en RDA et en Côte d’Ivoire, que toute structuration de personnages suit ou s’oppose néanmoins à des codes plus ou moins propres au médium bande dessinée et à un contexte de production donné. Ainsi, nous serons donc, d’un côté, en mesure de rendre compte des codes établis nous permettant non seulement de reconnaitre dans des faits graphiques un type “humain” mais aussi des différents “sous-types” d’un tel concept communément partagé. En effet, selon le rôle que les différents récits attribuent à telle ou telle opposition linguistique, iconique et/ou plastique, il nous sera possible de mettre en lumière les variations transtemporelles et transculturelles de tels codes et, ainsi, nos différentes conceptions de ce qui est considéré comme “autrui”. D’un autre côté, et plus important encore, notre approche sémiologique nous permettra de fournir une véritable théorie des personnages de récit graphique. Après avoir longtemps dominé la pensée de diverses sciences humaines en Europe, le transfert (souvent) trop rapide des notions et concepts élaborés en linguistique a dernièrement conduit à un rejet (parfois) violent de la sémiologie lorsque cette dernière s’intéressait à des discours autres que linguistiques. En plaçant au centre de notre analyse un discours « pluricode » (Klinkenberg 1996 : 232), susceptible d’englober à la fois des énoncés linguistiques, iconiques, plastiques et narratifs, nous montrerons non seulement que toute autre approche aux personnages, qu’elle soit sociologique, esthétique, psychologique, philosophique ou autre, qu’elle se veuille descriptive ou prescriptive ou qu’il s’agisse d’une lecture subjective ou critique, s’appuie, de façon consciente ou non, sur les processus décrits par la sémiologie mais que la sémiologie, lorsqu’elle réussit à se détacher de son « impérialisme linguistique » (Groupe Mu 1992 : 10-11) nous fournit aussi les acquis nécessaires afin de mettre en lumière les procédés, plus ou moins universels, par lesquels nous donnons du sens aux phénomènes du monde dit sensible.

Parcours

  • Depuis 09/2016 : Doctorant en cotutelle à l’Université Paris Descartes (ED 566) et l’Universität Leipzig (Allemagne)
  • Depuis 09/2016 : Lecteur du DAAD à l’Université Paris Diderot
  • 07/2016 – 08/2016 : Professeur contractuel de langue allemande à l’Institut-Goethe, Varenholz, Allemagne
  • 09/2015 – 05/2016 : Professeur contractuel de langue allemande à l’ECAM, Lyon, France
  • 09/2014 – 08/2015 : Assistant de langue allemande à l’Université FHB, Abidjan, Côte d’Ivoire
  • 10/2013 – 04/2014 : Assistant de langue allemande au lycée, Lyon, France
  • 07/2014 : Diplômé de l’Université franco-allemande (UFA) : Double-cursus alternant entre l‘Universität Leipzig et l’Université Lyon II
    – Master 2 Études germaniques, mention très bien
    – Master 2 Arts, Lettres, Langues, mention très bien
    – Master of Education allemand/français, mention très bien

Publications / Communications

– Sähn, Thomas (2019) : « Von der kontrastiven Syntax zum fehlerfreien Text? – Die Verwendung eines Syntaxmodells als Grundlage für die autonome Textproduktion von DaF-Lernenden im frankophonen Ausland », article présenté à la conférence : Schreiben in Kontexten : Soziokulturelle Dimensionen der Textproduktion in Deutsch als Fremdsprache, Universität Wien (Autriche), 2-3/05/ 2019 (Publication prévue pour 2020)

– Sähn, Thomas (2018) : « Die Darstellung des Fremden in französischen, deutschen und ivorischen Jugendcomics », article présenté à la conférence : Literatur – Medien – Migration : Zur Transformation der Literatur durch Medien und Migration, Université FHB, Abidjan (Côte d’Ivoire), 9-11/07/2018.

– Bastian, Sabine & Sähn, Thomas (2018) : « Parler de la guerre : Dialogues dans les romans de la première guerre mondiale, dans : Goudaillier, J.-P. & Perko, G. (dir.) : Comment parle-t-on de la guerre en terme populaires / argotiques, Ljubljana : Znanstvena zalo žba Filozofske fakultete, pp. 89-102.

– Bastian, Sabine & Sähn, Thomas (2014) : « La traduction des argots : Aspects diachroniques », dans : A. Kacprzak & J.-P. Goudaillier (dir.) : Fonctions identitaires en situations diglossiques : argots – dialectes – patois [Actes du VIIe Colloque International d’Argotologie, Łódź (Pologne) : Wydawnictwo Uniwersytetu Łódzkiego, pp. 31-48.